En écho : Sobornost’, plaidoyer pour un concept
Dans notre précédent numéro (n. 102, hiver 2008-09) nous avions présenté, sous le titre « La sobornost’ ou le mythe de la société alternative », un entretien avec André Filler, à propos de ce concept d’origine chrétienne orientale, repris par Alexeï Stepanovitch Khomiakov au XIXe siècle en réplique au rationalisme froid hérité du protestantisme et des Lumières occidentales. Boris Lejeune, sculpteur et auteur russe résidant en France, qui s’est déjà exprimé dans Catholica, nous a fait parvenir une série de remarques à la suite de cette publication, que nous présentons volontiers.
Le sujet soulève la question de la dialectique entre le juridique et le spirituel, l’ordre et la conscience du « nous », de l’être-ensemble et de la vocation collective, réalités profondément humaines devant s’associer comme le corps et l’âme, comme la raison et la foi, et dont le divorce ne peut déboucher que sur les excès de l’utilitarisme ou du fidéisme romantique. L’adjectif russe sobornyi correspond au mot grec catholicos qui signifie entier, un, commun, universel. Le premier à employer ce terme fut Ignace d’Antioche dans sa lettre aux fidèles de l’Eglise de Smyrne. Sa lettre dénonçait une doctrine selon laquelle le Christ ne s’était pas incarné, n’avait pas souffert et n’était pas ressuscité. Ces hérétiques, les docètes, ne voulaient pas participer à l’Eucharistie et ainsi se séparaient de l’Eglise. Saint Ignace s’adresse ainsi à eux : « Suivez tous l’évêque, comme Jésus-Christ suit son Père, et le presbyterium comme les Apôtres ; quant aux diacres, respectez-les comme la loi de Dieu.