Autres livres reçus
Parmi les autres livres reçus, signalons : DOBRITSA TCHOSSITCH (DOBRICA COSIC), Le temps de l’imposture ou le roman de Tito, L’Âge d’Homme, Lausanne, 2008, 25 €. Un gros livre (360 p.) présentant sous la forme de mémoires imaginaires d’un paysan devenu ministre la vie au jour le jour de Josip Broz, ce criminel de guerre et de paix, honoré de par le monde comme le champion d’un communisme assagi. Œuvre d’imagination ? Non pas, mais bien plutôt une longue méditation sur ce qui reste honteux, comme le souligne Georges Nivat, le fait que ce régime dégradant ait pu être accepté parce qu’il « donnait à chaque Yougoslave un peu de pouvoir », celui de nuire aux autres.
PAUL YONNET, Le Testament de Céline, Éditions de Fallois, janvier 2009, 20 €. Réflexion sur la culture, son histoire et sa dégradation, par un sociologue issu du milieu ouvrier, vivant aujourd’hui au fin fond de la campagne normande, et qui se révèle auteur littéraire de talent et tout sauf superficiel. ouvrage rare, comme ceux dénichés chez un bouquiniste dont Paul Yonnet avoue qu’il est une sorte d’abonné permanent. Ouvrage riche de multiples entrées — histoire politique, technique littéraire, expérience de la douleur, interrogation spirituelle… On y reviendra.
CARDINAL GEORGES-MARIE COTTIER, Vous serez comme des dieux, Parole et Silence, février 2009, 35 €. une nouvelle histoire de l’athéisme occidental, centrée, quoique non exclusivement, sur le XIXe siècle (Feuerbach, Marx, Nietzsche et Schopenhauer occupent les deux tiers des 418 pages). L’absence d’index pour un volume de ce genre est incompréhensible. Les petits chapitres de la fin renferment des pistes suggestives sur l’athéisme comme idolâtrie.
XAVIER MARTIN, La France abîmée. Essai historique sur un sentiment révolutionnaire (1780–1820), Dominique Martin Morin, Bouère, février 2009, 21 €. Cinquième volet de l’œuvre de l’historien, « L’homme des droits de l’homme ». Cette fois il s’agit de passer au crible la vie quotidienne à l’époque révolutionnaire, dans son organisation et ses effets, que l’on comparera aisément aux totalitarismes ultérieurs. Les chapitres centraux (pp. 134–194) constituent à cet égard un sous-ensemble cohérent, sur « la traque des pensées et arrière-pensées », sur la surveillance de tous par tous et l’autosurveillance jusqu’à « éviter de paraître soi ». L’anthropologie des Lumières réalisée.
JEAN BORELLA, La crise du symbolisme religieux, L’Harmattan, coll. Théôria, décembre 2008, 34 €. Réédition revue et corrigée, considérée comme définitive par l’auteur, d’une œuvre considérable d’érudition, et partie prenante au réexamen de la légitimité de la réforme liturgique postconciliaire (cf. notamment, comme application pratique, le chapitre V, « D’un symbolisme prétendument retrouvé »).
LOUIS BOUYER, Le rite et l’homme. Sacralité naturelle et liturgie, Cerf, janvier 2009, 24 €. Il s’agit d’une simple réimpression de l’original paru en 1962, devenu introuvable. Œuvre scientifique, qui sépare soigneusement le christianisme des religions à mystère de l’antiquité, établit continuité et discontinuité entre espace liturgique chrétien et héritage de la synagogue. L’auteur changera curieusement certaines de ses affirmations dans Architecture et liturgie, également réimprimé dernièrement par le même éditeur, à partir d’un original de 1967 cette fois.
MARC LEVATOIS, La messe à l’envers. L’espace liturgique en débat, Éditions Jacqueline Chambon/ Actes Sud, mars 2009, 20 €. Le titre est de Paul Claudel s’insurgeant en 1955 contre les expériences de retournement des autels. Ce livre est la partie finale et adaptée d’une thèse soutenue à la Sorbonne en 2006, « Liturgie et organisation intérieure de l’espace des églises catholiques. Contribution à une géographie du sacré et de ses mutations ». Très au courant des débats actuels autour des formes du culte, l’auteur ramène aux données fondamentales de l’anthropologie de l’Incarnation et de ses conséquences sur les modalités de la prière, de ses expressions et de ses cadres. Cette démarche scientifique est un acte de grande portée, surtout dans les circonstances présentes.
WILLIAM CAVANAUGH, Torture et Eucharistie, Ad Solem/ Cerf, février 2009, 30 €. Gros ouvrage (445 p.) de réflexion critique dirigée, comme en son temps celle de Gustavo Gutiérrez, à l’encontre du moment Maritain en matière de politique et religion. L’auteur, influencé par le courant dit Radical Orthodoxy, mais plus encore par le théologien J. B. Metz, s’efforce de préciser les contours d’une « politique alternative » récupérant la valeur de sens du sacrement central de la foi, méthode qui le rapproche de Carl Schmitt, mais dans un sens distinct que l’on pourrait nommer l’anarcho-catholicisme, comme on dit l’anarcho-syndicalisme.
Parmi les nombreuses autres publications qui nous sont parvenues, nous retenons une réédition de L’Homme et l’Etat, de Jacques Maritain (DDB, janvier 2009, 22 € ), avec une préface laudative de Paul Valadier ; l’ouvrage collectif, cité dans l’éditorial du présent numéro, Dieu et la Cité. Le statut contemporain du théologico-politique, sous la direction de Philippe Capelle (Cerf, octobre 2008, 29 €), avec de très intéressantes contributions sur la philosophie politique, sur les positions de Schmitt, Peterson, Metz, Strauss, et sur les problèmes posés par le nihilisme contemporain. A noter une utile mise au point sur la tragédie intérieure de l’islam, perpétuellement voué au raidissement, par Abderrahim Lamchichi.
Autre thème, la guerre. Sur ce sujet : Jean-François Rioux (dir.), L’intervention armée peut-elle être juste ? Aspects moraux et éthiques des petites guerres.