Revue de réflexion politique et religieuse.

Edi­to­rial : La démo­cra­tie déclas­sée

Article publié le 5 Fév 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

La pre­mière forme des nou­veaux contours de la démo­cra­tie est consti­tuée de la « par­ti­ci­pa­tion ». La démo­cra­tie admi­nis­tra­tive pré­tend, par exemple, don­ner aux admi­nis­trés non seule­ment un droit de regard – d’information – sur le fonc­tion­ne­ment d’une admi­nis­tra­tion déci­dant hors d’eux, mais aus­si leur confé­rer, par l’intermédiaire de pro­cé­dures consul­ta­tives, de débats publics, de leur pré­sence dans des com­mis­sions, de leur par­ti­ci­pa­tion à des réfé­ren­dums consul­ta­tifs voire déci­sion­nels, un pou­voir de déci­sion exer­cé simul­ta­né­ment à celui dont dis­pose tra­di­tion­nel­le­ment l’administration du fait de sa subor­di­na­tion aux ins­tances repré­sen­ta­tives « démo­cra­ti­que­ment » élues. La démo­cra­tie envi­ron­ne­men­tale (ou éco­lo­gique) pro­cède de la même démarche, à ceci près qu’elle sélec­tionne ses inter­lo­cu­teurs, comme l’avait fait avant elle la démo­cra­tie sociale : ce sont les asso­cia­tions de pro­tec­tion de l’environnement, recon­nues et agréées comme telles, qui sont ame­nées à par­ti­ci­per au pro­ces­sus déci­sion­nel. Cette forme, rela­ti­ve­ment clas­sique, est tou­te­fois plus récem­ment dépas­sée par le déve­lop­pe­ment d’une démo­cra­tie dite « plu­rielle ». Ain­si, dans le cas de la France, le « Gre­nelle de l’environnement », pro­ces­sus ins­tal­lé depuis 2007 pour déve­lop­per un droit et des pra­tiques se vou­lant pro­tec­trices de l’environnement (for­cé­ment durable), vise à construire une « démo­cra­tie éco­lo­gique » qui se mani­feste par la pro­cé­dure d’élaboration de ses propres normes. Il s’agit d’une « gou­ver­nance à cinq » : repré­sen­tants des col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales, des entre­prises, des orga­ni­sa­tions syn­di­cales de sala­riés, des asso­cia­tions de pro­tec­tion de l’environnement, et de l’Etat. Ce péri­mètre, dans lequel les ins­tances repré­sen­ta­tives clas­siques sont diluées au sein des pre­mière et cin­quième caté­go­ries qui viennent d’être men­tion­nées, est ame­né à pré­pa­rer les pro­jets de loi, dont le Par­le­ment ne sau­rait s’écarter sans se voir repro­cher de remettre en cause « l’esprit » de l’entité semi-col­lec­tive qui en a éla­bo­ré le texte, dont l’appellation offi cielle com­plète est d’ailleurs « Gre­nelle Envi­ron­ne­ment. Entrons dans le monde d’après ». Après la démo­cra­tie repré­sen­ta­tive vient le temps de la confron­ta­tion d’une plu­ra­li­té d’acteurs dotés de com­pé­tences et de moyens inégaux, mais théo­ri­que­ment pla­cés sur un pied d’égalité, sans aucun rap­port direct avec l’élection, sinon peut-être au sein d’instances mili­tantes auto-ins­ti­tuées. Sans être encore tota­le­ment mort, le pro­ces­sus élec­tif est désor­mais consi­dé­ré comme insi­gni­fiant, com­plé­té (pour évi­ter de dire rem­pla­cé) par un sys­tème de gentleman’sagreemententre oli­garques et groupes de pres­sion, à la géo­mé­trie très variable, voire aléa­toire. […]

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