Revue de réflexion politique et religieuse.

Autour des régimes tota­li­taires

Article publié le 10 Juil 2011 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

On sait qu’avec la chute du mur de Ber­lin, nom­breux furent en Europe de l’Ouest les esprits qui crurent, non sans naï­ve­té, que toutes les pesan­teurs et tous les inter­dits qui faus­saient les débats sur le tota­li­ta­risme – non pas tant, évi­dem­ment, sur la théo­rie et le concept que sur les régimes dits tota­li­taires et leurs pra­tiques – allaient être enfin refou­lés. Venant quelques années après l’« effet Sol­jé­nit­syne », la chute du mur et le déli­te­ment du bloc de l’Est sem­blaient auto­ri­ser les plus grands espoirs. En réa­li­té, mal­gré la paru­tion en l’espace d’un lustre de trois livres qui res­te­ront comme autant de bornes mil­liaires – Le Pas­sé d’une illu­sion (1995) de Fran­çois Furet, Le Livre noir du com­mu­nisme (1997) sous la direc­tion de Sté­phane Cour­tois, enfin la tra­duc­tion fran­çaise en 2000 du grand livre d’Ernst Nolte, La Guerre civile euro­péenne 1917–1945 –, la situa­tion n’a pas fon­da­men­ta­le­ment chan­gé, du moins en France. On ne revien­dra pas ici sur les rai­sons anciennes, pro­fondes, struc­tu­relles, qui expliquent que notre pays est, à cet égard, une excep­tion en Europe. Elles ont fait l’objet de plu­sieurs livres et articles, dont cer­tains ont paru dans cette revue. On illus­tre­ra plu­tôt la réma­nence des pesan­teurs confor­mistes à tra­vers le cas d’un ouvrage récent qui pré­tend pour­tant s’en affran­chir, avant de faire res­sor­tir, par contraste, toute l’originalité et toute la richesse qui se dégagent d’une étude ancienne, mais tra­duite en fran­çais il y a peu, sur l’interprétation en pro­fon­deur du fas­cisme comme phé­no­mène euro­péen.
Abu­si­ve­ment pré­sen­té comme un livre de l’auteur, alors qu’il eût été plus juste de faire figu­rer sur la cou­ver­ture la men­tion « Sous la direc­tion de » ou encore « Textes pré­sen­tés par », l’ouvrage de Ber­nard Bru­ne­teau est com­po­sé d’un long essai intro­duc­tif (pp. 9–86), sui­vi d’une antho­lo­gie de plus de cin­quante textes – extraits, sou­vent brefs, d’ouvrages ou d’articles parus entre 1930 et 1942, chaque texte étant pré­cé­dé d’une notice bio-biblio­gra­phique. Auteur d’un inté­res­sant ouvrage inti­tu­lé L’« Europenouvelle » de Hit­ler, paru en 2003 dans la même col­lec­tion « Démo­cra­tie ou tota­li­ta­risme » fon­dée et diri­gée par Sté­phane Cour­tois (col­lec­tion pas­sée depuis des édi­tions du Rocher aux édi­tions du Cerf), Bru­ne­teau, en ouver­ture de son essai, n’hésite pas à par­ler (après bien d’autres), à pro­pos du cas de Nolte en France, d’« excom­mu­ni­ca­tion » (p. 13) et s’interroge sur les rai­sons des ten­ta­tives pour euphé­mi­ser et rela­ti­vi­ser la cri­mi­na­li­té des régimes com­mu­nistes. Mais, ici comme sur d’autres points que l’on va voir, l’auteur, après avoir fait deux pas cou­ra­geux en avant, s’empresse d’en faire trois en arrière, comme pour bien mon­trer qu’il n’entend pas fran­chir vrai­ment les limites du poli­ti­que­ment cor­rect. C’est ain­si qu’il tourne autour du pot pour expli­quer l’excommunication de Nolte en France, alors que celle-ci n’a fon­da­men­ta­le­ment qu’une seule et unique rai­son : la pré­sence mas­sive d’anciens com­mu­nistes ou de cryp­to-com­mu­nistes dans le sys­tème uni­ver­si­taire, dans le monde de l’édition et dans l’univers des médias. […]

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