Stéphane Courtois (dir.) : Sortir du communisme, changer d’époque. Après la chute du Mur
Une vingtaine d’auteurs français et étrangers originaires des pays sous domination communiste font le point sur l’étrange vide laissé par l’effondrement du système, vingt ans après sa fin symbolique. Il y a beaucoup de choses dans ce livre très kaléidoscopique, qui fournissent autant de matériaux à l’histoire, la géopolitique et la sociologie du pouvoir. Chacun des chapitres appellerait une recension propre et pourrait donner lieu à des questions et des approfondissements. Un petit chapitre comme celui de Sylvain Boulouque sur la mémoire du communisme « entre dénégation, exaltation et hypomnésie » fournit, par exemple, un petit tableau des cliques qui assurent dans la France d’aujourd’hui le maintien du « grand mensonge » (évoqué naguère par Anton Ciliga), ainsi que de leurs méthodes de terrorisme intellectuel. Cela complète ce qu’écrit Alexandra Viatteau sur « les fruits de la désinformation à l’Est et à l’Ouest » à propos de la Pologne et de Katyn en particulier. On regrette que si la « démocratie » préoccupe beaucoup divers auteurs de cet ouvrage, la religion y tienne une place très restreinte, pas plus que les modes de vie de l’homo (post)sovieticus. L’approche reste principalement politique.
Le premier chapitre, écrit par Stéphane Courtois, pose la question de départ : pourquoi le régime soviétique s’est-il effondré ? Cette introduction est brève, mais elle s’arrête à un constat : il s’est autodétruit bien plus qu’il n’a été détruit sous les coups de ses opposants, internes ou externes. Les deux temps de l’implosion finale n’y ont rien pu faire, ni la perestroïka qui a cherché à imiter la NEP pour sauver les meubles par un regain de dynamisme, ni la glasnost, sorte de nouveau « dégel » intérieur. La leçon dépasse de beaucoup le cas de l’URSS et devrait être retenue par tous ceux qui pensent pouvoir s’accrocher indéfiniment à un mythe trop artificiel et négateur des réalités pour pouvoir s’éterniser.