Apologie anomique de l’indéterminé
Autour de Michel Maffesoli, une dizaine de chercheurs du Centre d’études sur l’actuel et le quotidien (CEAQ, Université René Descartes Sorbonne Paris V), s’interrogent dans L’homme postmoderne ((. Michel Maffesoli et Brice Perrier (dir.), L’homme postmoderne, François Bourin éditeur, 2012, 212 p., 20 €. )) sur les caractéristiques de l’homme contemporain, qualifié de postmoderne en référence à la postmodernité définie aussi bien comme époque que comme conception d’un rapport particulier de l’homme à la raison. On ne pourra s’empêcher de discerner rapidement dans l’accumulation redondante des caractéristiques de ce type d’humanité, au premier rang desquelles culmine l’« indétermination », un furieux penchant pour un historicisme nombriliste où parfois le dithyrambique le dispute à la platitude la plus radicale. Mais précisons d’abord la charge. L’ouvrage, qui exprime du reste des conceptions diverses, possède des intérêts réels mais surtout un défaut atavique rédhibitoire : celui précisément de vouloir définir l’indéterminé. N’eût-il pas été plus avisé de questionner que d’affirmer : l’homme postmoderne existe-t-il ? En proposant l’impossible archétype du « divers », du « multiple », de « l’indéterminé », Maffesoli et plusieurs autres chercheurs ne nous offrent que l’alternative soit de croire que l’heure du totalitarisme existentiel a sonné (où toute identité particulière ne serait qu’un reflet éphémère à la surface de la non-identité globale et obligatoire), soit qu’ils ne font que packager un produit vieux comme l’homme, à savoir l’homme lui-même.
L’homme postmoderne vivrait dans un temps universel, le présent éternel, au sein d’une société fractale composée de communautés mouvantes. Il se définirait par une série d’oxymores : nomade ancré, consommateur écologiste, rêveur réaliste, idéaliste pragmatique… Mais il serait d’abord un homme de l’émotion, mû par la réaction intérieure aux contacts, aux stimuli que démultiplie désormais la technologie.
Si l’on constate chez Maffesoli et la plupart des rédacteurs une sorte de jubilation à contempler cet homme de la jouissance et de l’immédiat, certaines contributions plus critiques mettent en exergue les limites de ce modèle.
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