Marie-Pauline Deswarte : La République organique en France
Professeur émérite de droit public de l’Université d’Artois, l’auteur s’inscrit dans les pas de juristes catholiques de formation classique, en particulier du grand analyste de l’Etat Marcel de la Bigne de Villeneuve.
M.-P. Deswarte, qui entend par « organique » la pluralité ordonnée d’une société, démonte méthodiquement, tout au long de cet ouvrage, les contradictions insolubles de la transcendance immanente propre au mythe moderne. La République (française) illustre bien la difficulté de maintenir l’unité du corps qui lui est soumis autrement que par une « indivisibilité » faite d’incessantes contraintes légales niveleuses dans leur logique propre. La partie constructive de l’ouvrage examine de possibles mesures réformistes en même temps qu’elle fait ressortir leurs inévitables limites (le vote familial insupportable à l’idée d’égalité, la représentation professionnelle au sein de quelque Conseil économique et social sans indépendance ni représentativité, les modestes « Principes de la Communauté » de Vichy condamnés en même temps que la révolution nationale promue par le régime, la référence à des droits de l’homme abusivement assimilés – par Maritain, entre autres – à l’intangible Loi naturelle). M.-P. Deswarte remarque que dans certaines situations, la République a dû parfois composer avec certaines formes d’organicité, notamment outre-mer, ou encore qu’elle a un temps semblé disposée à accepter le suffrage familial, comme en 1848. En réalité, tant que les principes demeurent, il est vain d’espérer le moindre changement, sauf si cela est momentanément utile, sous le poids de la nécessité – face, par exemple, à l’instauration d’Etats dans l’Etat à base ethno-religieuse. La conclusion de l’ouvrage évoque le « retour du réel » mais reste ouverte. L’auteur évoque à titre d’exemple la nouvelle constitution hongroise dont l’objectif affiché est de reconstruire après les ruines. Une question demeure, que n’aborde pas l’auteur : la République s’appuie, certes, sur la contrainte pour se survivre, mais ne repose-t-elle pas surtout sur un socle humain garant de sa durée, une base sociale faite des multiples réseaux d’intérêts idéologiques, financiers, « dynastiques » même dont l’ensemble constitue le « petit peuple » auquel s’était intéressé en son temps Augustin Cochin ? En ce sens alors, ne pourrait-on pas dire que la République est bel et bien organique ?