Revue de réflexion politique et religieuse.

Alain de Benoist : Le Trai­té trans­at­lan­tique et autres menaces

Article publié le 25 Juin 2015 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

Avec la négo­cia­tion du trai­té par lequel les pays de l’Union euro­péenne et les Etats-Unis (et dépen­dances) fusion­ne­raient leurs mar­chés en une immense zone de libre échange, nous sommes au cœur du fonc­tion­ne­ment des pou­voirs réels qui s’exercent sous l’égide de la com­plexi­té et de la trans­pa­rence. La « construc­tion euro­péenne » ne sera bien­tôt plus à consi­dé­rer que comme un modeste trem­plin vers l’intégration à l’économie amé­ri­caine, si le pro­jet arrive à son terme, avec les innom­brables consé­quences qui en résul­te­ront. On véri­fie l’analyse d’Augusto Del Noce, pour qui ce qui allait être appe­lé le mon­dia­lisme mar­quait le triomphe des idées « bour­geoises à l’état pur », déga­gées de tout reste d’attache reli­gieuse, patrio­tique, voire uto­pique et révo­lu­tion­naire. On com­prend aus­si du fait même la rai­son pour laquelle il est néces­saire de faci­li­ter l’opération en encou­ra­geant tout ce qui peut désta­bi­li­ser les fac­teurs de résis­tance au chan­ge­ment, en tous domaines. Alain de Benoist cite très oppor­tu­né­ment Jean Bau­drillard, pour faire sai­sir la rai­son de la rage avec laquelle l’opération est menée : pour le sys­tème mon­dial, « toute forme réfrac­taire est vir­tuel­le­ment ter­ro­riste ». La bar­ba­rie n’est pas que du côté de Daesh. Un cha­pitre cen­tral est dédié à la « gou­ver­nance », qui est effec­ti­ve­ment le cœur actif, en même temps que la cou­ver­ture séman­tique du nou­veau sys­tème de pou­voir. On doit com­prendre que les mots ont encore une impor­tance, ce qui pré­sup­pose que les socié­tés aux­quelles ont affaire les acteurs de ce jeu bien trouble doivent à leurs yeux avoir conser­vé une cer­taine facul­té de vigi­lance. Alain de Benoist s’inspire ici notam­ment des ana­lyses de Guy Her­met, et montre com­ment s’est opé­ré, à cou­vert de ce terme emprun­té à la culture mana­gé­riale anglo-saxonne, un trans­fert des moda­li­tés juri­diques et poli­tiques clas­siques à l’imposition de normes défi­nies par les organes diri­geants des grands acteurs éco­no­miques et finan­ciers de la pla­nète, com­plé­tées par les jeux d’influence et autres pres­sions au nom de l’expertise. Ce livre, com­po­sé sous forme de syn­thèses suc­ces­sives, consti­tue un vaste et impres­sion­nant état de la ques­tion, tenant compte d’un nombre impor­tant d’études et de docu­ments. Le cha­pitre sur la mon­dia­li­sa­tion va au-delà, don­nant, quoique briè­ve­ment, une cri­tique du réfor­misme carac­té­ris­tique de l’altermondialisme. Sur ce point, A. de Benoist énonce une véri­té – l’histoire ne revient jamais en arrière – mais ne pré­cise pas les consé­quences qu’il en tire. Le der­nier cha­pitre et l’annexe finale déve­loppent, le pre­mier, des idées plus per­son­nelles sur l’Europe comme empire, le second, une confé­rence sur la « rébel­lion », heu­reux appel au réveil, non assor­ti cepen­dant de réponses pro­por­tion­nées. Une courte for­mule affirme la néces­si­té d’en reve­nir à une concep­tion réel­le­ment sub­si­diaire – « l’autosuffisance ali­men­taire et éner­gé­tique ». Il fau­drait évi­dem­ment aller bien plus loin, non certes dans la pro­po­si­tion d’un pro­gramme dont cer­tains sont friands, du moins dans l’énoncé de véri­tables prin­cipes.

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