Revue de réflexion politique et religieuse.

Autres ouvrages reçus

Article publié le 1 Juil 2018 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

Léon Bloy, Essais et pam­phlets, Robert Laf­font, « Bou­quins », août 2017, 1 536 p., 34 €

« Chez Bloy tout est ardent car, rien n’étant pré­ju­gé, tout est démon­tré et tout devient donc par­fai­te­ment cer­tain, au sein d’une démarche qui est celle de la véri­table science qui est vraie phi­lo­so­phie. » Cette appré­cia­tion, tirée de l’une des notices de M. Caron, concerne Je m’accuse…, un pam­phlet diri­gé contre Émile Zola. Léon Bloy atteint des som­mets dans ses invec- tives d’une incroyable richesse, mais ce ne sont pas des jeux ver­baux, car il est très sérieux aus­si bien dans ses polé­miques que dans ses éloges. Certes, La Bruyère se mon­trait moins bru­tal dans ses Carac­tères, ce qui n’empêche pas le P. Laff y, o.p., qui pré­face cet énorme recueil, de le rap­pro­cher de Bos­suet quant à l’assimilation pro­fonde des Écri­tures.

Ber­nard Lugan, Mai 68 vu d’en face, Bal­land, mars 2018, 132 p., 13 €

Il est éton­nant de voir un uni­ver­si­taire, his­to­rien connu de l’Afrique, certes à contre-cou­rant depuis de longues années, évo­quer avec tru­cu­lence dans ce petit livre le sou­ve­nir des équi­pées menées par des mili­tants de l’AF, d’Occident et de la Cor­po de droit contre les bandes gau­chistes rivales. Le récit n’a aucune pré­ten­tion his­to­rique, mais il est sans doute utile pour l’étude des men­ta­li­tés acti­vistes limi­tant la vision poli­tique au plai­sir de la « cogne », des deux côtés d’ailleurs.

Xavier Mar­tin, Bec­ca­ria, Vol­taire et Napo­léon ou l’étrange huma­nisme pénal des Lumières (1760–1810), Domi­nique Mar­tin Morin, Poi­tiers, mars 2018, 304 p., 26 €

Il n’y a rien d’étonnant à ce que la phi­lo­so­phie des pen­seurs des Lumières ait fon­dé la ligne de conduite des légis­la­teurs du régime qui en est issu. Pour­tant l’idée répan­due, en ces temps de décom­po­si­tion de la moder­ni­té « dure », est que le Code pénal, res­té à peu près le même jusqu’aux réformes Badin­ter, aurait contre­dit, par sa dure­té, les prin­cipes huma­nistes du xviiie siècle, notam­ment for­mu­lés par Vol­taire et par le péna­liste ita­lien Cesare Bec­ca­ria. Quant à Napo­léon, ce grand car­nas­sier, il en a tel­le­ment assi­mi­lé les concep­tions maté­ria­listes et uti­li­ta­ristes qu’il s’en est mon­tré ren­ver­sant dans l’aveu réité­ré de sa propre inno­cence. Nous espé­rons reve­nir sur ce très riche neu­vième volet de la série « L’homme des droits de l’homme ».

Danièle Mas­son, Éric Zem­mour. Iti­né­raire d’un insou­mis, Pierre Guillaume de Roux, mars 2018, 264 p., 23 €

À tra­vers une bio­gra­phie très empa­thique, et mal­gré un lan­gage emprun­tant par­fois aux faci­li­tés de la grande presse et de la télé­vi­sion, on peut trou­ver dans cet essai – Danièle Mas­son est agré­gée de lettres et notam­ment auteur de plu­sieurs bio­gra­phies intel­lec­tuelles – de nom­breux élé­ments per­met­tant de mettre en évi­dence le rap­port étroit entre la main­mise de l’ultra-libéralisme sur les socié­tés euro­péennes et la des­truc­tion de la culture et des mœurs qui les affectent. Éric Zem­mour est en même temps un grain de sable dans les rouages de la domi­na­tion (il sub­siste grâce au fait d’être juif, un capi­tal de tran­quilli­té qui n’est pas com­plè­te­ment épui­sé), et un révé­la­teur très conscient des moda­li­tés de celle-ci. Il s’agit en par­ti­cu­lier de l’association entre une par­tie de l’appareil d’État (exé­cu­tif, sys­tème judi­ciaire) et les polices pri­vées de contrôle de la pen­sée et des com­por­te­ments, l’islam étant simul­ta­né­ment ins­tru­ment et béné­fi­ciaire. Le tout appuyé sur la réserve sociale que consti­tuent les bobos.

Fabio Mar­chese Rago­na, Tut­ti gli uomi­ni di Fran­ces­co. I nuo­vi car­di­na­li si rac­con­ta­no, San Pao­lo edi­trice, Milan, 2018, 382 p., 18 €

L’auteur, jour­na­liste, a pro­cé­dé à une série d’entretiens avec trente-cinq car­di­naux de tous les conti­nents ; le tout est pré­fa­cé de manière hagio­gra­phique par l’un des prin­ci­paux ins­pi­ra­teurs du cours actuel, le car­di­nal Óscar Rodrí­guez Mara­dia­ga. Le pre­mier inter­ro­gé est le car­di­nal Paro­lin, secré­taire d’État. D’entrée de jeu, il est ques­tion­né sur les dubia pré­sen­tés par quatre autres car­di­naux ; sa réponse donne le ton, sou­li­gnant l’aspect très mino­ri­taire à ses yeux des oppo­si­tions qui mettent « l’accent prin­ci­pal sur les ten­dances néga­tives du monde actuel » et pensent « que la fi lité à l’Évangile requiert une oppo­si­tion rigide et radi­cale », le tout expri­mé « sur un mode pas­sion­né, et si néces­saire, polé­mique », tan­dis que ceux qui ne se posent pas de ques­tion sont confiants « dans la créa­ti­vi­té du Saint-Esprit »… Mais tous ceux qui sont inter­ro­gés ne s’intéressent pas aux affaires doc­tri­nales prin­ci­pales : migrants, sécu­la­ri­sa­tion (le car­di­nal De Kesel y voit un grand bien), chô­mage, eutha­na­sie… Cer­tains tirent dans un sens plus tra­di­tion­nel (le Sué­dois Arbo­re­lius, par exemple, ou encore le car­di­nal Mül­ler, qui esquive les dif­fi­cul­tés en prô­nant une lec­ture selon la Tra­di­tion du pon­ti­fi­cat ber­go­glien). À lire avec atten­tion, même si, par la force des choses, l’ensemble de ces « fiches » reste assez en sur­face.

Signa­lons éga­le­ment trois ouvrages en anglais, aux­quels nous sou­hai­tons accor­der pro­chai­ne­ment l’attention qu’ils nous paraissent méri­ter.

Deux  ana­lyses  de  situa­tion,  tout  d’abord  :  Ross  Dou­that,  To  change  the Church. Pope Fran­cis and the future of Catho­li­cism, Simon and Shus­ter, New York,  mars  2018,  230  p.,  et  Phi­lip  F.  Law­ler,  Lost  She­pherd.  How  Pope Fran­cis is mis­lea­ding his flock, Regne­ry Gate­way, New York, 2018, 222 p. Et dans un genre dif­fé­rent, plus théo­lo­gique, Tho­mas Crean, o.p., (éd.), Digni­ta­tis Huma­nae Col­lo­quium, Dia­lo­gos Ins­ti­tute, Nor­cia, 2017, 218 p. Ce sont les Actes d’un col­loque, assez plu­ra­liste, tenu en novembre 2015, sous la pré­si­dence du car­di­nal Leo Burke.

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