Revue de réflexion politique et religieuse.

Numé­ro 159 : Face à la sécu­la­ri­sa­tion

Article publié le 19 Juil 2024 | imprimer imprimer  | Version PDF | Partager :  Partager sur Facebook Partager sur Linkedin Partager sur Google+

Il y a trois ans, le car­di­nal Jozef De Kesel, arche­vêque de Malines- Bruxelles, avait publié un livre inti­tu­lé Foi et reli­gion dans une socié­té moderne[1]. À la suite de quoi il fut notam­ment inter­ro­gé sur Radio Vati­can[2]. « C’est clair que dans une culture reli­gieuse chré­tienne, il n’y avait pas de vraie liber­té reli­gieuse. La foi n’est alors pas l’op­tion de la per­sonne, mais c’est la culture en tant que telle qui prend cette option. […] Donc la liber­té reli­gieuse, c’est un fruit de la moder­ni­té. » Le pro­pos est ver­bal et spon­ta­né, mais il tra­duit une concep­tion bana­li­sée depuis le début des temps conci­liaires : la civi­li­sa­tion chré­tienne, tant célé­brée dans les dis­cours pon­ti­fi­caux, n’ap­puyait pas la foi inté­rieure des croyants, elle ne for­mait qu’un car­can externe et trom­peur dont la pri­va­ti­sa­tion contem­po­raine de la reli­gion l’a libé­rée. Nous sommes main­te­nant à une année de la célé­bra­tion du cente­naire de l’en­cy­clique Quas pri­mas, de Pie XI, qui pro­cla­mait, face à un monde prêt à bas­cu­ler dans l’au­to­des­truc­tion, la pri­mau­té de la royau­té sociale du Christ. À l’é­poque, le milieu ecclé­sias­tique témoi­gnait contre le laï­cisme et ses consé­quences socio­po­li­tiques, et contre les tota­li­ta­rismes.

Dans le même temps, mais sans lien avec un tel dis­cours, com­men­çait de se déve­lop­per, prin­ci­pa­le­ment dans l’es­pace aca­dé­mique ger­ma­nique, une réflexion de fond sur la pri­va­ti­sa­tion de la reli­gion dans les socié­tés jadis chré­tiennes. C’est à par­tir de là que s’est éla­bo­ré le grand dis­cours socio­lo­gique de la sécu­la­ri­sa­tion, vaste recherche des causes et des effets des temps nou­veaux.

Le mot « sécu­la­ri­sa­tion » a d’a­bord un sens actif, comme la grande série des termes de même suf­fixe, en l’oc­cur­rence celui d’une action fai­sant pas­ser du sacré au pro­fane. Dide­rot en don­ne­ra encore cette défi­ni­tion dans l’Ency­clo­pé­die : « Sécu­la­ri­sa­tion. Action de rendre sécu­lier un reli­gieux, un béné­fice ou lieu qui était régu­lier. » Le trai­té de West­pha­lie (1648) avait déjà uti­li­sé le mot dans le domaine civil, à pro­pos du trans­fert de cer­tains biens ecclé­sias­tiques aux princes pro­tes­tants. C’est à par­tir de l’é­poque révo­lu­tion­naire que le même sens s’é­lar­gi­ra, pour se confondre avec la laï­ci­sa­tion, forme de guerre antire­ligieuse bien connue en France. Le dic­tion­naire du CNRTL cite ain­si la défi­ni­tion qu’en don­nait Renan dans L’a­ve­nir de la science (1890) : « pro­ces­sus d’é­li­mi­na­tion pro­gres­sive de tout élé­ment reli­gieux ».

Dans l’aire ger­ma­nique pro­tes­tante, sauf lors du Kul­tur­kampf de Bis­marck, qui a consti­tué une courte excep­tion, la sécu­la­ri­sa­tion prend la forme moins radi­cale d’une pri­va­ti­sa­tion de fait de la reli­gion, lar­ge­ment (quoique non tota­le­ment) dis­pa­rue de la vie col­lec­tive.

Ce phé­no­mène est le résul­tat de la longue lutte de puis­sance et d’é­man­ci­pa­tion menée contre l’É­glise par l’é­lite poli­tique, éco­no­mique, intel­lec­tuelle et même pour une part reli­gieuse, bien avant la Révo­lu­tion. Il s’i­den­ti­fie donc au jeu com­plexe des causes concou­rantes pro­duc­trices de la rup­ture moderne. Machia­vé­lisme des princes, soif des richesses de la bour­geoi­sie, liber­ti­nage et athéisme en ont été le moteur, sans omettre le fac­teur essen­tiel qu’est l’É­tat moderne[3]. On a beau jeu de pré­sen­ter ce phé­no­mène comme une évo­lu­tion natu­relle, la fin d’une époque sta­tique et l’ir­rup­tion de l’es­prit dyna­mique qui a spé­ci­fié la moder­ni­té… La réa­li­té n’est pas exac­te­ment celle-là, en ce sens que l’é­vo­lu­tion des tech­niques, des modes d’or­ga­ni­sa­tion, des connais­sances aurait pu se pro­duire dans la conti­nui­té et non dans la rup­ture, en res­pect du com­man­de­ment de Genèse I, 26 : « Rem­plis­sez la Terre et sou­met­tez-la. » C’est toute l’his­toire occi­den­tale des Temps Modernes qui voit ain­si émer­ger un phé­no­mène plein d’am­bi­guï­té : une éman­ci­pa­tion du pou­voir reli­gieux, puis de la reli­gion, à même de libé­rer bien des dési­rs, un joug que l’é­lite ne sup­porte plus, tout cela dans la com­plexi­té des jeux de pou­voir, de l’ap­pé­tit des richesses, de la vaine recherche de la gloire, de l’af­fa­dis­se­ment spi­ri­tuel et de l’affir­mation du sujet. C’est sur ce fond que va s’ap­puyer l’œuvre d’ir­ré­li­gion d’où éma­ne­ra, entre autres, la Révo­lu­tion fran­çaise.

La déchris­tia­ni­sa­tion de l’es­pace public des socié­tés occi­den­tales résulte effec­ti­ve­ment d’une action déli­bé­rée, d’une volon­té de secouer le joug. Paul VI, au moment de la clô­ture du concile Vati­can II, avait trou­vé une for­mule résu­mant ce mou­ve­ment d’en­semble : « la reli­gion de l’homme qui se fait Dieu ». L’ex­pres­sion pour­rait rele­ver du lexique pro­phé­tique tra­di­tion­nel en usage dans l’É­glise depuis l’aube de la moder­ni­té, mais la phrase qui sui­vait mar­quait une sur­pre­nante rup­ture : « Qu’est-il arri­vé ? Un choc, une lutte, un ana­thème ? Cela pou­vait arri­ver ; mais cela n’a pas eu lieu. La vieille his­toire du bon Sama­ri­tain a été le modèle et la règle de la spiri­tualité du Concile. Une sym­pa­thie sans bornes pour les hommes l’a enva­hi tout entier[4]. »

* * *

L’ap­proche pro­pre­ment scien­ti­fique de la sécu­la­ri­sa­tion a éclos dans le milieu des uni­ver­si­tés alle­mandes du début du xxe siècle, essen­tiel­le­ment à par­tir de la paru­tion de L’é­thique pro­tes­tante et l’es­prit du capi­ta­lisme, de Max Weber (1904–1905), où celui-ci lance l’i­dée de « désen­chan­te­ment du monde » (Ent­zau­be­rung der Welt) — phé­no­mène impu­té, comme on le sait, aux consé­quences pra­tiques du cal­vi­nisme et du puri­ta­nisme qui consi­dé­raient le tra­vail comme un impé­ra­tif pre­mier, et la réus­site maté­rielle en résul­tant comme une preuve de l’é­lec­tion divine, et, à par­tir de là, jus­ti­fiaient la recherche du pro­fit — d’où un dés­équi­libre, tout à l’op­po­sé de la règle béné­dic­tine de l’o­ra et labo­ra.

En 1922, le juriste Carl Schmitt publie la pre­mière ver­sion de sa Théo­lo­gie poli­tique, dans laquelle il pro­longe l’a­na­lyse ain­si amor­cée et énonce une for­mule plus tard qua­li­fiée de « théo­rème[5] », posant que « tous les concepts pré­gnants de la théo­rie moderne de l’É­tat sont des concepts théo­lo­giques sécu­la­ri­sés[6] ». Schmitt don­nait de nom­breux exemples étayant cette affir­ma­tion, comme l’in­vo­ca­tion des cir­cons­tances excep­tion­nelles, qui cor­res­pon­draient au miracle, l’om­ni­po­tence du légis­la­teur évo­quant la toute-puis­sance divine, etc. Il en résul­tait que la moder­ni­té était dépour­vue de véri­table nou­veau­té et se conten­tait de sin­ger ce qu’elle pré­ten­dait rem­pla­cer.

C’est tou­te­fois à par­tir seule­ment des len­de­mains de la Deuxième Guerre mon­diale que cer­tains auteurs alle­mands ont lan­cé, à pro­pre­ment par­ler, le débat scien­ti­fique sur la sécu­la­ri­sa­tion. La ques­tion a fait l’ob­jet de dis­cus­sions intenses, le « théo­rème » étant mis en cause, au nom de la nou­veau­té radi­cale de la moder­ni­té, par Hans Blu­men­berg, auteur de Die Legi­ti­mität der Neu­zeit (1966 ; tr. fr. La légi­ti­mi­té des temps modernes, Gal­li­mard, 1999) -, prin­ci­pa­le­ment diri­gé contre Schmitt, et contre Löwith qui en par­ta­geait l’a­na­lyse.

Dans Mea­ning in His­to­ry : The theo­lo­gi­cal impli­ca­tions of the phi­lo­so­phy of his­to­ry (1949 ; trad. fr. His­toire et salut, Gal­li­mard, 2002), Löwith iden­ti­fiait dans le mar­xisme nombre de trans­po­si­tions d’élé­ments reli­gieux, comme le pro­lé­ta­riat, qui serait le nou­veau peuple élu, la socié­té sans classes, le Para­dis, et ain­si de suite. Il appli­quait donc le théo­rème au champ his­to­rique, et plus pré­ci­sé­ment au tra­ves­tis­se­ment de la théo­lo­gie de l’his­toire qu’est la phi­lo­so­phie de l’his­toire, comme Schmitt l’ap­pli­quait à la concep­tion du poli­tique. « Pour Hegel, note Löwith, l’his­toire du monde est une théo­di­cée, et la “ruse de la rai­son” est “le concept ration­nel pour dési­gner la Pro­vi­dence”. Or la ten­ta­tive de “réa­li­ser le règne de Dieu dans l’his­toire du monde” et, ce qui va de pair, la trans­po­si­tion de la théo­lo­gie en phi­lo­so­phie impliquent en réa­li­té une rup­ture radi­cale avec la pers­pec­tive qui était celle d’Au­gus­tin ou d’O­rose, et encore celle de Bos­suet[7]. »

C’est donc prin­ci­pa­le­ment Hans Blu­men­berg qui a déve­lop­pé, à par­tir de 1966, la cri­tique la plus métho­dique du théo­rème de la sécu­la­ri­sa­tion. Le titre de son ouvrage le plus connu, déjà men­tion­né, en indique clai­re­ment la thèse : Die legi­ti­mi­tat der Neu­zeit, le mot alle­mand Neu­zeit étant plein de sens, indi­quant le Novum, la nou­veau­té radi­cale recon­nue à la Moder­ni­té. Celle-ci serait un phé­no­mène auto­nome, non une trans­po­si­tion inavouée de concepts chré­tiens. Le fameux théo­rème, dit Blu­men­berg, n’en tient aucun compte : d’a­bord, il repose sur le pos­tu­lat d’une sub­stance inchan­gée, au-delà de trans­formations acci­den­telles ; ensuite, la moder­ni­té n’au­rait pas de conte­nu propre, elle ne serait qu’une défor­ma­tion de la théo­lo­gie poli­tique, elle n’au­rait donc pas de légi­ti­mi­té (concep­tuelle)[8]. Blu­men­berg, d’o­ri­gine juive mais catho­lique, contri­bue donc à jus­ti­fier la moder­ni­té dans les cercles théo­lo­giques. La dis­cus­sion alle­mande autour de la sécu­la­ri­sa­tion a alors débor­dé les fron­tières. Les retom­bées de Mai 68 n’ont guère pro­duit une avan­cée du mythe com­mu­niste, en dépit du folk­lore maoïste et d’autres désordres évo­lu­tion­naires dans le tiers­monde, et tan­dis que le régime sovié­tique enta­mait son par­cours ter­mi­nal. Elles ont bien plus puis­sam­ment sanc­tion­né le pas­sage à la post­mo­der­ni­té, au fur et à mesure que la socié­té de l’o­pu­lence triom­phait. La post­mo­der­ni­té, sous ce rap­port, n’est qu’un appro­fondissement de la sécu­la­ri­sa­tion.

Quel juge­ment peut-on por­ter sur l’in­ter­mi­nable dis­cus­sion aca­dé­mique autour de ce thème, du moins du point de vue qui nous retient ici : sa mécon­nais­sance, puis son accep­ta­tion acri­tique au sein de l’É­glise catho­lique ? À cer­tains égards, ce débat est intel­lec­tuel­le­ment très riche, mais il est aus­si très abs­trait[9]. Il reste concen­tré sur l’a­na­lyse des idées, des grands cou­rants d’é­vo­lu­tion de la socié­té occi­den­tale, y com­pris lors­qu’il est cen­sé abor­der le champ poli­tique. Par­ti d’Al­le­magne — et donc for­te­ment influen­cé par le pro­tes­tan­tisme, ou encore par le conser­va­tisme anti­li­bé­ral -, il s’est expor­té, tar­di­ve­ment, en France notam­ment, ou en Amé­rique du Nord. À cet égard, la dif­fé­rence saute aux yeux entre sécu­la­ri­sa­tion et laï­ci­té. La sécu­la­ri­sa­tion est appré­hen­dée, de manière spé­cu­la­tive, comme un phé­no­mène social d’en­semble, une immense vague his­to­rique de trans­for­ma­tion du monde consis­tant dans le can­ton­ne­ment de la reli­gion (chré­tienne) au domaine pri­vé — ce que rend aisé le pro­tes­tan­tisme — et la trans­po­si­tion de cer­tains de ses concepts dans le registre idéo­lo­gique. La sécu­la­ri­sa­tion est une sub­ver­sion de type natu­ra­liste, qui vide la vie sociale d’un monde ancien­ne­ment chré­tien de l’es­sen­tiel de ce qui lui don­nait sens.

Bien dif­fé­rente, plus tri­viale, est l’ac­tion laïque d’o­ri­gine révolution­naire. Tou­jours à l’œuvre, mais décon­te­nan­cée par la crise interne de l’É­glise, elle est ins­tru­men­ta­li­sée pour impo­ser les aspi­ra­tions des acti­vistes du sys­tème domi­nant, et notam­ment lever les der­niers freins au désir des biens maté­riels. Il reste que, le temps pas­sant, les situa­tions tendent for­te­ment à s’u­ni­fier. Un signe très net en est que l’ir­ré­li­gion pra­tique frappe, à quelques nuances près, l’en­semble de ce qu’il est conve­nu d’ap­pe­ler l’Oc­ci­dent. On devrait ici se repor­ter à Augus­to Del Noce, à pro­pos de ce qu’il nomme l’ir­ré­li­gion natu­relle. Pour lui, « l’homme qui a per­du la dimen­sion du pas­sé, mais aus­si celle de l’a­ve­nir, avec la fin de l’i­déal révo­lu­tion­naire, se réduit à [une] mens momen­ta­nea. On est par­ve­nu aujourd’­hui au moment de la pos­si­bi­li­té de la dis­pa­ri­tion morale de l’homme, de son invo­lu­tion dans l’a­ni­ma­li­té[10] ».

La conscience de la dégra­da­tion humaine pro­duite par la séculari­sation, for­te­ment dénon­cée ici par Del Noce, semble avoir pro­vo­qué diverses réac­tions de per­plexi­té, ou bien encore sus­ci­té des ten­ta­tives pour trou­ver des com­pen­sa­tions, ou des freins, fussent-ils illu­soires. C’est ain­si qu’un cer­tain nombre d’au­teurs ont éla­bo­ré des interpré­tations per­son­nelles de la sécu­la­ri­sa­tion, ou encore émis des réserves à l’en­contre des géné­ra­li­sa­tions jugées par eux abu­sives.

Jür­gen Haber­mas, dans Der phi­lo­so­phische Dis­kurs der Moderne : zwölf Vor­le­sun­gen (1985 ; trad. fr. : Le dis­cours phi­lo­so­phique de la moder­ni­té, Gal­li­mard, 1988), avait adhé­ré à l’i­dée de la sécu­la­ri­sa­tion des sources reli­gieuses du pas­sé, non pour en cri­ti­quer le résul­tat — comme le fai­saient ses com­pa­gnons révo­lu­tion­naires de l’É­cole de Franc­fort — mais pour l’ac­cep­ter plei­ne­ment. Seule­ment, par la suite, dans Zwi­schen Natu­ra­lis­mus und Reli­gion : phi­lo­so­phische Auf­sätze (2005 ; trad. fr. Entre natu­ra­lisme et reli­gion. Les défis de la démo­cra­tie, Gal­li­mard 2008), Haber­mas a expri­mé des doutes face à la per­sis­tance des réac­tions reli­gieuses, non seule­ment dans les pays dits « à forte nata­li­té », jugés arrié­rés et donc plus reli­gieux, mais aus­si, en parti­culier, aux États-Unis. « Le pen­seur de la rai­son com­mu­ni­ca­tion­nelle ne croit plus dans les seules res­sources de la ratio­na­li­té pra­tique et com­mu­ni­ca­tion­nelle pour four­nir une base moti­va­tion­nelle suf­fi­sante face à des périls carac­té­ri­sés de diverses façons : “une moder­ni­té qui tend à sor­tir de ses rails”, “une conscience nor­ma­tive qui s’é­tiole de tous côtés” […]. Que s’est-il pas­sé pour qu’un revi­re­ment se soit pro­duit chez Haber­mas sur ce point ? La chose reste, à vrai dire, mys­té­rieuse. Haber­mas semble avoir fait sienne l’i­dée selon laquelle la ratio­na­li­té serait inca­pable de four­nir par elle-même un “concept de la vie bonne”[11]. » N’exa­gé­rons rien cepen­dant. Haber­mas ne renie pas ses prin­cipes. Il consi­dère seule­ment que la logique mon­dia­liste devrait évi­ter la pure tech­no­cra­tie et béné­fi­cier au contraire de l’ap­port des diverses reli­gions s’il est utile à quelque titre. « Les » reli­gions peuvent donc contri­buer à leur manière à la bonne marche de la socié­té sécu­lière. « La pen­sée post­mé­ta­phy­sique devrait adop­ter une atti­tude à la fois agnos­tique et accueillante en matière reli­gieuse, sans com­pro­mettre pour autant son iden­ti­té sécu­lière[12]. »

Dans une veine com­pa­rable, on peut aus­si faire allu­sion à Peter Ber­ger, auteur d’un ouvrage au titre pro­vo­ca­teur : The dese­cu­la­ri­za­tion of the world (EPPC, Washing­ton D.C., 1999) — où, entre autres, il pre­nait soin de dis­tin­guer entre classes diri­geantes mon­dia­listes hyper­sé­cu­la­ri­sées et monde réel fai­sant retour vers le reli­gieux sous toutes ses formes. Un thème lar­ge­ment repris par le Cana­dien Charles Tay­lor, auteur en par­ti­cu­lier de The secu­lar age (Har­vard, 2007 ; trad. fr. : L’âge sécu­lier, Seuil, 2009). Tay­lor admet les prin­ci­paux élé­ments de la théo­rie de la sécu­la­ri­sa­tion, mais il refuse de réduire celle-ci à un rejet pur et simple de la reli­gion, bien qu’il ramène cette der­nière à une affaire pure­ment pri­vée, expri­mant un besoin indi­vi­duel humain fon­da­men­tal. « Dans le “cadre imma­nent” où nous sommes ins­tal­lés, mar­qué par l’é­cla­te­ment des modèles d’a­chè­ve­ment, il est maintes manières de répondre à l’in­sa­tis­fac­tion où nous met la “pétri­fi­ca­tion méca­nique” des temps actuels. Cer­tains d’entre nous vont s’at­ta­cher à recom­po­ser autre­ment, sur un mode non uti­li­ta­riste, leur rap­port à l’im­ma­nence. […] Cette voie, croyante, de la résis­tance est celle qu’empruntent aujourd’­hui, sous diverses formes, nombre de nos contem­po­rains[13]. » Tay­lor pense ain­si que la sécu­la­ri­sa­tion, non seule­ment n’est pas venue à bout du reli­gieux, mais que ce der­nier est une sorte d’an­ti­dote sus­ci­té par l’a­néan­tis­se­ment du sens de la vie pro­vo­qué par la moder­ni­té et son escha­to­lo­gie imma­nen­tiste.

Ce type d’a­na­lyse n’a pas ces­sé à ce jour. Un socio­logue alle­mand, Det­lef Pol­lack, insiste ain­si sur le carac­tère arti­fi­ciel de la thèse de la sécu­la­ri­sa­tion. Auteur d’une longue étude publiée en fran­çais, « La théo­rie de la sécu­la­ri­sa­tion au banc d’es­sai[14] », il prend le contre-pied de l’i­dée selon laquelle la sécu­la­ri­sa­tion défi­ni­tive est iné­luc­table, à pro­por­tion de la réduc­tion de la vie à la tech­nique. Comme ses col­lègues pré­cé­dem­ment cités, il fait deux constats : d’une part, la vie reli­gieuse col­lec­tive se réduit, d’autre part la reli­gio­si­té indi­vi­duelle et sans dogmes se déve­loppe. Les pro­pos du car­di­nal De Kesel, rap­por­tés au début du pré­sent article, semblent s’ap­puyer sur les mêmes constats et en déga­ger une vision opti­miste.

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La sécu­la­ri­sa­tion a été défi­nie et ana­ly­sée par des pro­tes­tants, par beau­coup d’a­thées, et bien sûr aus­si par des catho­liques. Avant de voir com­ment elle a été per­çue au sein même de l’ins­ti­tu­tion ecclé­siale, par­ti­cu­liè­re­ment concer­née par la ques­tion à par­tir du concile Vati­can II, nous pou­vons rap­pe­ler que cer­tains auteurs catho­liques ont réso­lu­ment choi­si d’en­trer dans la logique sécu­la­riste, d’y voir même une occa­sion libé­ra­trice. Conten­tons-nous de men­tion­ner deux figures typiques, Joseph Moingt et Gian­ni Vat­ti­mo.

Citons tout d’a­bord le P. Moingt, s.j., inter­pré­tant le rejet de la culture chré­tienne hors du domaine de la vie col­lec­tive contem­po­raine : « Un des­tin […] qui peut aus­si et qui doit d’a­bord se lire comme une voca­tion chris­tique, un appel à quit­ter les joutes du dogme, les champs clos du reli­gieux, les enivre­ments de la pié­té, les patois fami­liers, pour assu­mer l’his­toire des autres là où elle se vit, pour cher­cher la ques­tion de Dieu là où elle se pose dans l’an­goisse, la révolte et les inter­ro­ga­tions des hommes de notre temps, appel à pas­ser de l’autre côté[15]. » Il s’a­git donc pour le jésuite de reprendre le slo­gan de Fré­dé­ric Oza­nam, « pas­sons aux bar­bares », ne visant plus, cette fois, le petit peuple délais­sé, mais « les autres », les post-chré­tiens. On remarque, d’un côté, la réduc­tion cari­ca­tu­rale de la théo­lo­gie, de ses concepts (iden­ti­fiés à un jar­gon incom­pré­hen­sible) et de la pra­tique reli­gieuse tra­di­tion­nelle qua­li­fiée d’é­brié­té, de l’autre, glo­ba­le­ment consi­dé­rés, les « hommes de notre temps » — expres­sion qui sous-entend que les pré­cé­dents ne sont que des morts-vivants et, de plus, qui géné­ra­lise consi­dé­ra­ble­ment à par­tir du seul modèle domi­nant dans les pays les plus occi­den­ta­li­sés.

Gian­ni Vat­ti­mo, quant à lui, est bien un « post-chré­tien », dis­ciple de Nietzsche, en même temps qu’il a une connais­sance de la doc­trine chré­tienne. Il pré­tend donc récu­ser celle-ci, du moins dans sa pré­sen­ta­tion tra­di­tion­nelle, en même temps que la méta­phy­sique, dans laquelle il voit une forme de vio­lence. Il leur oppose une concep­tion « kéno­tique », celle d’un chris­tia­nisme faible. Telle est la sub­stance du pen­sie­ro debole, qui prône la « cha­ri­té » contre la rigueur doc­tri­nale, et l’a­dap­ta­tion des règles morales aux besoins de la socié­té sécu­lière — et à cer­tains pen­chants des indi­vi­dus. « En résu­mé, le retour au chris­tia­nisme aujourd’­hui doit être, selon Vat­ti­mo, de repen­ser les conte­nus de la révé­la­tion en termes sécu­la­ri­sés, à la lumière de la cha­ri­té et de la situa­tion actuelle. Ce qui n’a pas grand-chose à voir avec “un retour de repen­ti dans la mai­son du père” (p. 82). Le mes­sage du Christ s’a­dresse à des croyants d’une culture et d’un temps par­ti­cu­liers, dans une situa­tion défi­nie. Le chré­tien, dans son agir his­to­ri­que­ment situé, doit se posi­tion­ner face à la révé­la­tion, dans une double atti­tude démy­tho­lo­gi­sante (il faut inter­pré­ter, ne pas prendre le mes­sage au pied de la lettre) et croyante (on ne se des­sai­sit jamais de toute mytho­lo­gie ni de notre his­toire[16]. »

Com­ment alors consi­dé­rer Vati­can II : comme une réponse catho­lique aux théo­ries de la sécu­la­ri­sa­tion, ou bien comme une ten­ta­tive pour s’in­té­grer aux figures suc­ces­sives de la moder­ni­té, de la postmo­dernité, et à pré­sent de l’a­près-post­mo­der­ni­té ?

Dans un petit essai inti­tu­lé « Vati­can II dans l’his­toire de la sécula­risation », l’his­to­rien et dis­ciple fervent de Jacques Mari­tain, Michel Four­cade, four­nit en moins d’une page une excel­lente réponse à cette ques­tion[17] Il com­mence par rap­pe­ler la for­mule, ou le mot d’ordre, du domi­ni­cain Marie-Domi­nique Che­nu, défi­nis­sant selon ce der­nier la tâche prin­ci­pale de Vati­can II : sanc­tion­ner « la fin de l’ère constan­ti­nienne ». De ce fait, le lien était éta­bli entre ce qui devait être l’ob­jet pre­mier du concile et l’en­semble des réflexions sur le théo­lo­gi­co- poli­tique. On connaît la suite, le mar­queur prin­ci­pal de l’é­vé­ne­ment étant la Décla­ra­tion sur la liber­té reli­gieuse « venue tour­ner la page de l’É­tat confes­sion­nel si long­temps requis par la théo­lo­gie catho­lique[18] ».

Ce texte fon­da­men­tal fait l’ob­jet d’un pre­mier com­men­taire de Paul VI, avec son mes­sage aux gou­ver­nants (8 décembre 1965) : « Et que demande-t-elle de vous, cette Église, après deux mille ans bien­tôt de vicis­si­tudes de toutes sortes dans ses rela­tions avec vous, les Puis­sances de la Terre ; que vous demande-t-elle aujourd’­hui ? Elle vous l’a dit dans un des textes majeurs de ce Concile : elle ne vous demande que la liber­té. »

Pour ache­ver cet ensemble, le mes­sage au corps diplo­ma­tique du 8 jan­vier 1966 vient confir­mer l’a­ban­don du magis­tère de l’É­glise — de la sou­ve­rai­ne­té du Christ — sur les gou­ver­nants. « L’É­glise ain­si défi­nie en elle-même, et située par rap­port à ce qui n’est pas elle, appa­raît avec une autre carac­té­ris­tique qui ne fut pas tou­jours clai­re­ment mise en lumière dans les siècles pas­sés : elle se montre entiè­re­ment déga­gée de tout inté­rêt tem­po­rel. Un long tra­vail interne, une prise de conscience pro­gres­sive, en har­mo­nie avec l’é­vo­lu­tion des cir­cons­tances histo­riques, l’ont ame­née à se concen­trer sur sa mis­sion. Aujourd’­hui son indé­pen­dance est totale en face des com­pé­ti­tions de ce monde, pour son plus grand bien à elle, et Nous pou­vons bien ajou­ter aus­si, pour celui des sou­ve­rai­ne­tés tem­po­relles.

« Est-ce à dire que l’É­glise se retire au désert et aban­donne le monde à son sort, heu­reux ou mal­heu­reux ? C’est tout le contraire. Elle ne se dégage des inté­rêts de ce monde que pour mieux être en mesure de péné­trer la socié­té, de se mettre au ser­vice du bien com­mun, d’of­frir à tous son aide et ses moyens de salut. Mais elle le fait aujourd’­hui — et c’est une nou­velle carac­té­ris­tique de ce Concile, qui a été sou­vent rele­vée — elle le fait d’une façon qui contraste en par­tie avec l’at­ti­tude qui mar­qua cer­taines pages de son his­toire. »

Les deux pas­sages indi­qués ici en ita­lique sont lourds de sens : selon Paul VI, il y a un avant et un après, une époque où les choses n’é­taient pas claires… L’af­fir­ma­tion dépasse en réa­li­té de beau­coup la nature d’un pro­pos diplo­ma­tique, dans la mesure où elle exprime en fait un regret. Elle équi­vaut à une décla­ra­tion de retrait. Des deux pou­voirs, l’É­glise et l’É­tat, il n’en reste plus qu’un seul[19]. On com­prend aisé­ment, dans cette situa­tion d’i­né­ga­li­té, que la royau­té du Christ ne puisse plus être célé­brée comme au temps de l’en­cy­clique Quas pri­mas ; du moins doit-elle être ampu­tée de son aspect social tem­po­rel, pour n’être désor­mais reçue que du seul point de vue spi­ri­tuel, au sein seule­ment du Corps mys­tique.

Le P. Patrick Pré­tot, o.s.b., pro­fes­seur de litur­gie à l’Ins­ti­tut catho­lique de Paris, confirme ain­si le sens de ce chan­ge­ment : « Ins­ti­tuée par l’en­cy­clique Quas pri­mas du Pape Pie XI (1925), et pla­cée au der­nier dimanche d’oc­tobre, la fête du Christ-Roi appa­rais­sait comme une fête auto­nome célé­brant le “règne social de Jésus-Christ”. […] Dans la période post-conci­liaire, cette fête a sus­ci­té une cer­taine gêne tant il est vrai que sa dimen­sion socio-poli­tique était liée à une vision des rap­ports entre l’É­glise et la socié­té qui sem­blait éloi­gnée de l’en­sei­gne­ment du Concile Vati­can II. Pou­vait-on encore dire par exemple : “aux catho­liques il appar­tien­dra de faire ren­trer triom­phalement le Christ-Roi dans les conseils de leurs gou­ver­ne­ments et dans les rela­tions sociales de leurs sem­blables” ? […] Le thème de la royau­té du Christ abri­tait, en faveur de l’É­glise et de la reli­gion, la reven­di­ca­tion d’une place dans une socié­té en voie de sécu­la­ri­sa­tion accé­lé­rée. […] Dès lors, et en pla­çant la fête du Christ-Roi au der­nier dimanche de l’an­née litur­gique, comme une sorte d’in­clu­sion avec le pre­mier dimanche de l’Avent, la réforme de Vati­can II a trans­for­mé pro­fon­dé­ment le sens de cette célé­bra­tion […][20]. »

* * *

Il semble que la for­mule choi­sie comme titre du pre­mier de ses Car­nets de route par Emma­nuel Mou­nier, en 1950, ait péné­tré bien des esprits avant même le concile : Feu la chré­tien­té. Ce fut la période au cours de laquelle « tan­tôt en dou­ceur, tan­tôt dans les dou­leurs, on pas­sa de l’i­déo­lo­gie mis­sion­naire à une idéo­lo­gie tiers-mon­diste. […] Ain­si donc s’é­tait accom­plie la méta­mor­phose : de l’é­ta­blis­se­ment de la Cité de Dieu, uto­pie de la pre­mière phase, en pas­sant par la pré­sence de Dieu dans la cité des hommes, objec­tif de la deuxième phase, on est arri­vé à l’a­mé­na­ge­ment de la cité des hommes[21] ». Au terme du tableau qui vient d’être rapi­de­ment dres­sé, un constat s’im­pose. La doc­trine constante de l’É­glise concer­nant la digni­té de l’ordre poli­tique natu­rel et son rap­port à la vie de la grâce ne sont plus clai­re­ment per­çus depuis le chan­ge­ment de para­digme conci­liaire. Certes, la liber­té de pro­fes­ser la reli­gion du Christ peut être entra­vée, les per­sé­cu­tions sont même dans sa nature pro­fonde. Mais sa fonc­tion pro­phé­tique la conduit à témoi­gner face au monde, et sou­vent contre le monde, des exi­gences et des fina­li­tés de l’ordre poli­tique, de la véri­té, de la jus­tice, de l’hon­neur ren­du au Créa­teur. En 1997, les évêques fran­çais sem­blaient encore le pro­fes­ser, dans le rap­port pré­sen­té par l’un des leurs, Mgr Dagens, inti­tu­lé Pro­po­ser la foi dans la socié­té actuelle, où l’on pou­vait lire : « Nous ne pou­vons pas nous rési­gner à une totale pri­va­ti­sa­tion de notre foi, comme si l’ex­pé­rience chré­tienne devait res­ter enfouie dans le secret des cœurs, sans prise sur le réel du monde et de la socié­té. Notre Église n’est pas une secte. » En écho inver­sé, le pré­sident de la Confé­rence des évêques de France, Mgr de Mou­lins-Beau­fort, a été der­niè­re­ment ame­né à pré­ci­ser sa pen­sée, de la manière sui­vante : « S’il y a une ques­tion cen­trale, c’est une ques­tion de théo­lo­gie poli­tique et de rap­port au monde. Le décret de Vati­can II sur la liber­té reli­gieuse est très clair. Le Christ n’est pas venu bâtir des nations catho­liques mais il est venu fon­der l’É­glise. Ce n’est pas la même chose. À force de traî­ner la nos­tal­gie d’un État catho­lique, on perd notre éner­gie pour l’é­van­gé­li­sa­tion[22]. »

Indi­rec­te­ment, la perte de sens où conduit la sécu­la­ri­sa­tion en son état actuel et la mise en évi­dence des pro­ces­sus qui l’ont pro­duite impliquent une pro­fonde recon­si­dé­ra­tion de telles asser­tions, toute cari­ca­ture polé­mique écar­tée. Et en pre­mier lieu, de se poser la ques­tion de la véri­té, ou de l’er­reur, d’une for­mule comme celle qui suit, alors adres­sée au monde plon­gé dans la guerre mon­diale : « De la forme don­née à la socié­té, en har­mo­nie ou non avec les lois divines, dépend et s’in­filtre le bien ou le mal des âmes, c’est-à-dire, si les hommes, appe­lés tous à être vivi­fiés par la grâce du Christ, res­pi­re­ront dans les contin­gences ter­restres du cours de leur vie l’air sain et vivi­fiant de la véri­té et des ver­tus morales, ou le microbe mor­bide et sou­vent mor­tel de l’er­reur et de la dépra­va­tion[23]. »

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[1]       Éd. Sal­va­tor, Mul­house, mai 2021, 140 p.

[2]       « Car­di­nal De Kesel : la sécu­la­ri­sa­tion est une chance pour la liber­té reli­gieuse », 11 juin 2021 ; acces­sible sur https://www.vaticannews.va/fr/eglise/news/2021 ‑06/­car­di­nal-de-kesel-foi- religion-societe-moderne.html

[3] Voir Ernst-Wolf­gang Bòckenfòrde, « La nas­ci­tà del­lo Sta­to come pro­ces­so di seco­la­riz­za­zione », pp. 34–54 de l’ou­vrage du même auteur, Dirit­to e seco­la­riz­za­zione. Dal­lo Sta­to moder­no all’Eu­ro­pa uni­ta a cura di Gemi­nel­lo Pre­te­ros­si, Later­za, Bari, 2007.

[4] Dis­cours de Paul VI du 7 décembre 1965

[5] « Théo­rème de la sécu­la­ri­sa­tion » est une expres­sion dépré­cia­tive due à Hans Blu­men­berg.

[6] Carl Schmitt, Théo­lo­gie poli­tique, 1922, III in Carl Schmitt, Théo­lo­gie poli­tique, 1922, 1969, Gal­li­mard, 1988, p. 46.

[7]  Cité ici par Jean-Fran­çois Ker­vé­gan, « Les ambi­guï­tés d’un théo­rème. La sécu­la­ri­sa­tion, de Schmitt à Löwith et retour », in Michael Foes­sel, Jean-Fran­çois Ker­vé­gan et Myriam Revault d’Al­lonnes (dir.), Moder­ni­té et sécu­la­ri­sa­tion. Hans Blu­men­berg, Karl Löwith, Carl Schmitt, Leo Strauss, CNRS édi­tions, 2007, § 13 (https://books.openedition.org/editionscnrs/6583).

[8]  Cf. Myriam Revault d’Al­lonnes, « Sommes-nous vrai­ment “déthéo­lo­gi­sés” ? Carl Schmitt, Hans Blu­men­berg et la sécu­la­ri­sa­tion des temps modernes », Les études phi­lo­so­phiques 2004–1 (n. 68), pp. 25–37. Pour une approche syn­thé­tique de la posi­tion phi­lo­so­phique de Blu­men­berg, signa­lons la longue confé­rence d’Her­vé Pas­qua, pro­non­cée le 18 jan­vier 2023, dis­po­nible sur https://www.youtube.com/watch?v=0jUqEoYWLg8

[9] Un article très dense de Chris­toph Theo­bald — « La “sécu­la­ri­sa­tion interne” du chris­tia­nisme : quel appren­tis­sage pour la théo­lo­gie ? », publié dans les Recherches de sciences reli­gieuses, n. 101 (2/2013), pp. 201–210, illustre très bien la péné­tra­tion (ou la pré­va­lence ?) de la socio­lo­gie dans la théo­lo­gie post-conci­liaire.

[10] Augus­to Del Noce, L’ir­ré­li­gion occi­den­tale, Fac-édi­tions, 1995, p. 212. « Mens momen­ta­nea » est une expres­sion emprun­tée à Leib­niz, reprise ici comme image pour évo­quer l’ab­sence d’i­den­ti­té dans laquelle vivrait l’in­di­vi­du sans mémoire autre qu’im­mé­diate, plon­gé dans le per­pé­tuel chan­ge­ment.

[11]  Jean-Claude Monod, « Haber­mas et la dia­lec­tique de la sécu­la­ri­sa­tion », http://www.laviedesidees.fr/ 08-12-2018, pp. 1–2.

[12] Archives de sciences sociales des reli­gions, n. 167, 2014, pp. 147–169, inté­gra­le­ment repris sur https://journals.openedition.org /assr/26168

[13] Phi­lippe Por­tier, « Charles Tay­lor et la socio­lo­gie de la sécu­la­ri­sa­tion », in Syl­vie Taus­sig (dir.), Charles Tay­lor. Reli­gion et sécu­la­ri­sa­tion, CNRS édi­tions, 2014 https://books.openedition.org/editionscnrs/50482, § 19

[14] Archives de sciences sociales des reli­gions, n. 167, 2014, pp. 147–169, inté­gra­le­ment repris sur https://journals. openedition.org /assr/26168

[15]    Joseph Moingt, « Une théo­lo­gie de l’exil », in Claude Gef­fré (dir.), Michel de Cer­teau ou la dif­fé­rence chré­tienne, Cerf, 1991, pp. 131–132.

[16] Sta­nis­las Deprez : « Gian­ni Vat­ti­mo, Espé­rer croire », compte ren­du in Revue phi­lo­so­phique de Lou­vain, 1999, p. 212. Espé­rer croire est la ver­sion fran­çaise (Seuil, 1998) de Cre­dere di cre­dere (Gar­zan­ti, Milan, 1996).

[17] Michel Four­cade, « Vati­can II dans l’histoire de la sécu­la­ri­sa­tion », Droits, n. 61, 2015/1, 53–60.

[18] Ibid.

[19] Dans son article déjà cité, Michel Four­cade donne le com­men­taire sui­vant : « Digni­ta­tis huma­nae n’enterrait donc expres­sé­ment que “l’État catho­lique”, au grand dam de tous ceux qui rêvaient encore de quelque “Sainte Alliance” : avec le dia­logue inter­re­li­gieux, la “liber­té reli­gieuse” est d’ailleurs res­tée depuis le prin­ci­pal grief de la mou­vance inté­griste, atta­chée à une habi­ta­tion ins­ti­tu­tion­nelle du Christ-Roi et pro­tes­tant der­rière Mgr Lefebvre : Ils L’ont décou­ron­né » (art. cit., p. 59).

[20]  Fr. Patrick Pré­tot, « La fête du Christ roi de l’U­ni­vers comme célé­bra­tion du mys­tère pas­cal », dis­po­nible sur un des sites de l’é­pis­co­pat fran­çais : https://liturgie.catholique.fr/celebrer- dans-le-temps/les-fetes-et-les-saints/4982-la-fete-du-christ-roi-de-l-uni­vers/. Éga­le­ment à ce sujet : Igna­cio Bar­rei­ro Caram­bu­la, « La royau­té du Christ dans la litur­gie et le dogme. Un cas d’ef­fet induit », in Ber­nard Dumont, Miguel Ayu­so, Dani­lo Cas­tel­la­no (dir.), Église et poli­tique. Chan­ger de para­digme, Artège, Per­pi­gnan, 2013, pp. 135–150.

[21] Jean Pirotte, « Refaire la chré­tien­té outre-mer », in Lau­rence van Yper­sele et Anne-Dolo­rès Mar­ce­lis (dir.), Rêves de chré­tien­té. Réa­li­tés du monde, Cerf (Paris)/UCL (Lou­vain-la-Neuve), 2001, p. 387.

[22]     Pro­pos dis­po­nibles sur https://jeunes-vocations.catholique.fr/actualites/313522-retour-sur-le-week-end-des-semi­na­ristes-a-paris-23-decembre-2023/

[23] Pie XII, Radio­mes­sage du 1er juin 1941, n. 5, pour le 50e anni­ver­saire de Rerum nova­rum.

 

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